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Arlette, chargée du volet communautaire santé sexuelle et reproductive en RDC

© Philémon Barbier

Travailleuse sociale et éducatrice spécialisée, Arlette Matutila Fumu a fait ses armes auprès des enfants des rues de Kinshasa, puis accompagné des personnes vivant avec le VIH avant de rejoindre Médecins du Monde en 2017. Elle est aujourd’hui un pivot du programme en droits et santé sexuelle et reproductive de l’association en République démocratique du Congo. Dans un pays où de nombreux tabous entourent la sexualité des jeunes, où la loi restreint considérablement l’accès à la contraception et à l’avortement, des relais communautaires s’activent jusque dans les écoles pour informer, rassurer, protéger.

Il y a beaucoup de résistance sur les questions liées à la sexualité. Des barrières socioculturelles.

Arlette

Chargée du volet communautaire du programme Droits et santé sexuels et reproductifs à Kinshasa

Comment travaillez-vous à sensibiliser les communautés ?

 

Nous avons identifié et formé des relais communautaires, des pairs éducateurs et des animateurs de cellules communautaires pour qu’ils puissent à leur tour organiser des séances de sensibilisation auprès de leur communauté sur les questions liées à la santé sexuelle et reproductive et promouvoir les services proposés au niveau des structures santé. Tout ce travail est fait sous la supervision de notre partenaire Afia Mama, une organisation de la société civile. Au niveau des écoles, nous développons une stratégie avancée en formant le personnel éducatif et ce que nous appelons des « élèves champions ». Ils font office de pairs en sensibilisant les autres élèves lors d’activités de groupe par exemple.

 

Quelles sont les obstacles que vous rencontrez ?

 

Il y a beaucoup de résistance sur les questions liées à la sexualité. Des barrières socioculturelles. Les enquêtes montrent que les jeunes sont sexuellement actifs très tôt. Mais l’information des adolescents est taboue. Il est difficile de parler ouvertement de sexualité car on considère qu’ils n’ont pas d’expérience. Et puis il y a la barrière des croyances, les religions qui n’acceptent pas que les jeunes aient des relations en dehors du mariage. Et pourtant c’est une réalité. Il y a des grossesses précoces, des avortements clandestins et non sécurisés parce qu’on ne peut pas parler de ces questions. C’est une façon de nier la vérité. Nous, nous essayons d’apporter des messages adaptés.

 

Comment les jeunes peuvent-ils être protégés ?

 

Nous avons également une clinique mobile où nous proposons gratuitement des méthodes contraceptives. C’est comme ça que j’ai rencontré une fille de 15 ans qui avait déjà deux enfants. Elle
vivait avec sa tante qui ne voulait pas la scolariser. J’ai senti sa frustration. Elle a fait le choix d’une contraception longue durée, un implant de cinq ans. Lors d’une sensibilisation sur les grossesses non intentionnelles dans une école, une autre fille est discrètement venue demander des précisions. Elle était enceinte et avait déjà pris contact avec des charlatans pour avorter clandestinement, avec beaucoup de risques. On a pu l’orienter vers une structure de santé. Elle disait que c’était une chance pour elle d’avoir eu cette information.

Kinshasa : Lever les tabous sur la sexualité