En Ethiopie, 3 millions d’enfants sont confrontés à la malnutrition aigüe . Cette situation est liée à une combinaison de 3 principaux facteurs:
- La grave sécheresse qui touche la Corne de l’Afrique depuis l’automne 2020.
- Les chocs économiques et notamment la forte inflation mondiale liée aux effets des restrictions sanitaires de la pandémie de COVID-19 et aux effets économiques mondiaux de la guerre en Ukraine, ainsi que l’inflation liée aux conflits locaux. En Ethiopie, l’inflation en 2022 dépassait les 30%.
- La persistance des conflits dans la région et particulièrement la Guerre au Tigré et les conflits chroniques en Somalie, empêche l’accès des populations aux services sociaux de base (et notamment la santé), restreint l’accès humanitaire, et perturbe les activités agro-pastorales.
Les communautés pastorales, les personnes vivant dans les zones de conflit ou s’étant déplacées suite à un conflit, mais aussi les femmes & les enfants, sont particulièrement affectés. En Ethiopie 74% des cas de malnutrition aiguë recensés concernent des enfants et 28% des femmes enceintes ou allaitantes. Moins de la moitié auront accès à un traitement, les taux de mortalité des malnutris avec complications sont anormalement élevés, reflet à la fois de l’accès trop tardif aux soins mais aussi de la faible qualité des soins (centres de santé sans accès à l’eau, sans intrant, sans personnel formé, hygiène inappropriée).
Cette détérioration de la situation sanitaire, particulièrement marquée dans les zones affectées par la guerre du Tigré, se reflète également dans la gravité des épidémies de maladies transmissibles (paludisme, rougeole), le tout dans un contexte de vulnérabilités accrues liées aux déplacements de population. Les prestations des services de santé sont interrompues (vaccination, soins) à cause de la fuite du personnel soignant, de la destruction des équipements et des stocks de médicament lors des pillages généralisés qui ont eu lieu durant les occupations successives des centres de santé par des forces armées. Par ailleurs, les soins sont négativement impactés par le manque d’hygiène dans les centres de santé lié en partie au manque d’accès à l’eau alors que la sécheresse a tari les sources les plus proches.
Les femmes sont fortement pénalisées par le manque d’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive: les mutilations génitales féminines, répandues en Ethiopie, engendrent de graves complications nécessitant une prise en charge médicale. Le pourcentage d’adolescentes ayant une grossesse est très élevé (>23%) et le nombre de mariages précoces a augmenté avec la crise. Par ailleurs, les femmes & les filles et particulièrement les femmes enceintes et allaitantes sont majoritairement touchées par la malnutrition. Les normes sociales & culturelles les poussent à manger en dernier et le moins possible ne permettant pas toujours aux femmes et aux adolescentes de combler leurs besoins en fer, ni d’apporter la majoration des apports énergétiques nécessaires aux femmes enceintes & allaitantes.
Aux problématiques préexistantes à la crise (violences liées au genre, crime d’honneur, etc.) s’ajoutent depuis 2 ans de nouvelles problématiques liées au conflit au Tigré, aux chocs économiques, et à la sécheresse (pertes de moyens de subsistance, séparation des familles lors des déplacements, viols de masse/viols en réunion, autre type de violences…). Ainsi les traumatismes vécus par ces populations, et particulièrement par les mères et par les enfants, aggravent les vulnérabilités de ces populations et augmentent les risques de malnutrition en affectant négativement les comportements et pratiques des personnes censées alimenter, stimuler & soutenir émotionnellement les enfants, ou en occasionnant des refus de manger menant à la malnutrition. Le manque de stimulation psychosociale & la malnutrition s’entretiennent dans un cercle vicieux.